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La ligne 15 du tramway genevois : de Lancy-Pont-Rouge à Palettes, puis Ziplo et, enfin, Saint-Julien-en-Genevois, Gare

Au début des années 2000, Genève engage une modernisation ambitieuse de son réseau de tramways, avec pour objectif de désengorger le centre-ville, renforcer les connexions entre quartiers périphériques et accompagner le développement urbain. Dans cette optique, la réintroduction et le développement de la ligne 15 s’inscrivent dans le cadre du projet "Réseau 2000", qui visait à faire du tram le mode structurant du réseau genevois.

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La ligne 15, disparue du paysage genevois depuis plusieurs décennies (dans sa version bus), renaît sous une forme moderne le 15 décembre 2004, répondant à des besoins croissants de mobilité entre les secteurs en forte mutation du canton.

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Le prolongement progressif de la ligne 15 vers l’ouest du canton et la frontière française répond à une double logique d’urbanisation maîtrisée et de coopération transfrontalière. Dès les années 2010, les autorités cantonales identifient le secteur ZIPLO (Zone industrielle de Plan-les-Ouates) et la commune de Saint-Julien-en-Genevois comme zones à fort potentiel de développement résidentiel, industriel et logistique.

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La saturation croissante des axes routiers et l’essor des flux de frontaliers imposent une réponse structurée en matière de transport public. Dans ce cadre, la ligne 15 s’impose comme vecteur de desserte efficace, en prolongeant le maillage du tramway au-delà du périmètre historique genevois.

 
1. Mise en service initiale (2004)
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Le 15 décembre 2004, la ligne 15 est inaugurée entre les terminus de Nations (au nord) et Lancy–Pont-Rouge (au sud), en passant par les principaux pôles d’échanges de Cornavin, Bel-Air, Plainpalais et Carouge. Cette première phase de réintroduction de la ligne marque une étape stratégique dans la construction d’un axe transversal, complémentaire aux lignes radiales existantes.

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Le tracé repose en grande partie sur des infrastructures réutilisées ou modernisées, ce qui permet une mise en service rapide à coûts relativement maîtrisés. Il répond aussi à une double exigence : connecter les pôles économiques du canton (dont le quartier des Nations et Carouge) et désenclaver des zones en transition (Lancy notamment).

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​2. Prolongement vers Les Palettes (2006)

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Moins de deux ans après sa création, la ligne 15 est prolongée le 21 mai 2006 jusqu’au quartier des Palettes, dans la commune de Lancy. Ce prolongement s’inscrit dans une logique d’extension périphérique du réseau afin de couvrir des zones résidentielles en pleine croissance démographique.

L’extension jusqu’à Palettes permet de :

  • desservir une zone densément peuplée mal reliée jusque-là au centre ;

  • améliorer la connectivité avec d’autres modes (train, bus) au niveau du nœud de Palettes ;

  • renforcer l’axe sud du réseau, en lien avec le futur développement vers Plan-les-Ouates et Saint-Julien-en-Genevois.

Ce prolongement s’accompagne de l’achèvement de la "boucle sud" du réseau, reliant les communes de Lancy, Carouge et Genève dans un tracé circulaire, augmentant ainsi la fluidité et la fréquence du service dans le cœur de l’agglomération.

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3. Prolongement vers ZIPLO (2023) 
 

Le 10 décembre 2023, la ligne 15 est prolongée de son ancien terminus de Palettes jusqu’à ZIPLO, situé dans la commune de Plan-les-Ouates. Cette extension représente un ajout de 2,7 km de ligne, avec la création de 5 nouveaux arrêts : Cherpines, Plan-les-Ouates, Les Semailles, ZIPLO Centre et ZIPLO.

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Objectifs de ce prolongement :

  • Connecter une zone d’activités industrielle stratégique, hébergeant de nombreuses entreprises de haute technologie et de logistique.

  • Offrir un mode structurant aux 5 000 travailleurs quotidiens de ZIPLO et aux habitants de la commune en forte croissance.

  • Soutenir le développement du quartier des Cherpines, un grand projet d’aménagement incluant logements, écoles et équipements publics.

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4. Projet de prolongement vers Saint-Julien-en-Genevois (France)

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4. Perspectives de réalisation

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Les perspectives de réalisation du prolongement du tramway 15 entre Genève (ZIPLO) et Saint-Julien-en-Genevois s’inscrivent dans une dynamique transfrontalière complexe, marquée par des ambitions de mobilité durable, mais également par des freins d’ordre juridique et administratif. Ce projet revêt une importance stratégique à plusieurs niveaux : il répond aux objectifs de développement urbain du Grand Genève, à la volonté d’intensifier les connexions entre la France et la Suisse, ainsi qu’à une exigence croissante de réduction des mobilités individuelles motorisées.

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Sur le plan opérationnel, la première section du prolongement, reliant Lancy à ZIPLO, a été inaugurée en décembre 2023. Cette étape, réalisée sur territoire suisse, illustre la faisabilité technique et l’adhésion locale au projet dans sa dimension intra-urbaine. Cependant, la seconde phase – transfrontalière – qui doit relier ZIPLO à la gare de Saint-Julien-en-Genevois, se heurte à des obstacles majeurs. Malgré une validation officielle du projet par les autorités fédérales suisses en juillet 2023, plusieurs recours juridiques ont été déposés, notamment du côté suisse, entraînant une suspension provisoire du démarrage des travaux.

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Ces procédures contentieuses ont un impact significatif sur le calendrier prévisionnel. Initialement envisagée pour 2025, la mise en service complète de la ligne jusqu’à Saint-Julien est désormais repoussée à un horizon plus incertain, oscillant entre 2027 et 2029 selon les estimations les plus prudentes. Il convient de souligner que le succès du projet est conditionné non seulement à la levée de ces recours, mais aussi à la coordination effective entre les partenaires institutionnels des deux côtés de la frontière. Cette situation révèle les tensions structurelles qui persistent dans la gouvernance des infrastructures transfrontalières, où les procédures suisses et françaises doivent s’articuler malgré des logiques parfois divergentes.

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En somme, si les perspectives techniques et financières du projet sont globalement assurées, sa réalisation effective dépend désormais d’une résolution favorable des contentieux juridiques et d’un pilotage institutionnel renforcé. Ce prolongement incarne ainsi un cas d’école de coopération transfrontalière à haute valeur stratégique, mais vulnérable aux aléas administratifs et aux résistances locales. Il interroge, plus largement, la capacité du Grand Genève à concrétiser une mobilité intégrée dans un contexte de souveraineté partagée et de réglementation différenciée.

 

5. Matériel roulant
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​En 2023, les TPG ont officialisé une commande de 38 rames Stadler Tramlink, avec des livraisons échelonnées à partir de 2025. Ces véhicules constituent la nouvelle génération de tramways genevois, destinés à remplacer progressivement les modèles plus anciens (notamment les Duewag-Vevey) et à équiper les extensions de réseau. D’une longueur d’environ 45 mètres, les Tramlink offrent un plancher bas intégral, une accessibilité universelle, une bidirectionnalité facilitant l’exploitation en milieu urbain dense, ainsi qu’un haut niveau de confort pour les usagers (climatisation, équipements numériques, interphonie, etc.).

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6. Financement 
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Le financement du prolongement de la ligne de tramway 15 constitue un enjeu structurant dans la mise en œuvre du projet, révélateur à la fois de l'ambition du Grand Genève en matière de mobilité durable, et des défis propres à la gestion d’un investissement transfrontalier. La structure budgétaire de cette infrastructure repose sur une coopération institutionnelle inédite, mobilisant des ressources suisses et françaises dans le cadre du Projet d’agglomération franco-valdo-genevois, outil de planification conjoint porté notamment par la Confédération suisse et les collectivités territoriales françaises.

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Montants engagés et ventilation budgétaire

Le coût total du prolongement complet du tramway 15, entre le terminus actuel de ZIPLO (Plan-les-Ouates) et la gare de Saint-Julien-en-Genevois, est estimé à environ 84 millions de francs suisses (CHF), soit près de 87 millions d’euros (valeurs indicatives selon les taux de change de 2024). Cette enveloppe comprend la réalisation de l’infrastructure ferroviaire (voies, stations, alimentation électrique), les aménagements urbains associés, ainsi que les acquisitions foncières nécessaires à la traversée de territoires périurbains.

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Le financement est réparti de la manière suivante :

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  • La Confédération suisse intervient à hauteur de 40 % du coût global, dans le cadre des crédits alloués aux projets d’agglomération, en vertu de la politique fédérale d’aide aux infrastructures urbaines (Office fédéral du développement territorial - ARE).

  • Le canton de Genève et les communes genevoises concernées assument une part importante des coûts sur leur territoire.

  • Les partenaires français, au premier rang desquels la commune de Saint-Julien-en-Genevois, la Communauté de communes du Genevois (CCG), le Département de la Haute-Savoie et la Région Auvergne-Rhône-Alpes, participent au financement de la section située en France, dont le coût est estimé à environ 15,8 millions CHF.

 

Cette contribution française est notable, car elle s’inscrit dans une logique de co-développement : bien que le tramway soit exploité par les Transports publics genevois (TPG), les bénéfices escomptés en matière de désenclavement et de réduction du trafic routier justifient un investissement au-delà des frontières nationales.

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Instruments financiers et gouvernance

La coordination financière du projet repose sur des instruments hybrides de planification et de contractualisation. Le Projet d’agglomération, approuvé en 2016 puis réactualisé en 2020 (PA3 et PA4), sert de cadre à l’engagement des parties prenantes. Il est soutenu par des mécanismes de cofinancement transnationaux qui imposent une synchronisation des calendriers budgétaires et des dispositifs juridiques entre partenaires français et suisses.

Cependant, les différences structurelles dans les systèmes institutionnels génèrent des tensions potentielles. La Suisse, dotée d’une forte autonomie cantonale et municipale, articule ses contributions sur une base de subsidiarité, tandis que la France mobilise des financements étatiques et régionaux via des contrats territoriaux. Ce décalage peut complexifier la conduite financière du projet, notamment dans la répartition des responsabilités en cas de dépassement budgétaire ou de retard dans les travaux.

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Enjeux financiers à moyen terme

À moyen terme, les retards occasionnés par les recours juridiques en Suisse pourraient engendrer des surcoûts liés à l’actualisation des prix des matériaux, à la prolongation des études et à la reprogrammation des crédits d’investissement. Ces surcoûts, bien que non chiffrés à ce jour, pourraient contraindre les collectivités à revoir leur participation ou à rechercher de nouvelles sources de financement (subventions européennes, partenariats publics-privés, etc.).

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Enfin, le modèle économique post-mise en service repose sur une exploitation à l’équilibre par les TPG, avec une participation des usagers et des compensations publiques en cas de déficit. La question du modèle tarifaire transfrontalier (intégration des zones, subventions croisées) constitue aussi un enjeu de gouvernance financière durable.

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7. Potentiel de réalisation

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Malgré les recours actuellement en cours, nous continuons de considérer ce projet comme hautement réalisable d'ici la fin de la décennie. 

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8. Conclusion
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Le projet de prolongement de la ligne de tramway 15 de Genève jusqu’à Saint-Julien-en-Genevois s’inscrit dans une trajectoire historique, technique et politique à la fois cohérente et ambitieuse. Depuis sa réintroduction en 2004, la ligne 15 a progressivement renforcé son rôle structurant dans le maillage du réseau genevois, accompagnant les dynamiques de croissance urbaine et les mutations territoriales du canton. L’extension vers ZIPLO, mise en service en 2023, illustre la capacité du territoire à répondre aux nouveaux besoins de desserte économique, résidentielle et environnementale.

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Le projet de franchissement de la frontière vers Saint-Julien-en-Genevois s’inscrit dans une logique de coopération transfrontalière à haute valeur stratégique. Il incarne une réponse concrète aux défis contemporains de la mobilité durable, de la congestion routière et de l’intégration territoriale entre la France et la Suisse. Toutefois, sa réalisation reste tributaire de facteurs institutionnels, juridiques et financiers complexes. Les recours administratifs suisses en cours, les différences de gouvernance entre les deux pays et la coordination des financements publics soulignent les fragilités inhérentes à tout projet transfrontalier.

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Sur le plan budgétaire, la mobilisation conjointe de financements suisses et français constitue un modèle de coopération exemplaire, mais potentiellement vulnérable en cas de retards ou de réévaluations des coûts. Le succès du projet repose donc sur la capacité des partenaires à maintenir leur engagement à long terme, à surmonter les obstacles procéduraux, et à adapter les instruments de gouvernance aux réalités binationales.

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En définitive, le prolongement de la ligne 15 vers Saint-Julien-en-Genevois constitue bien plus qu’un simple projet de transport : il est un révélateur des ambitions territoriales du Grand Genève, de ses capacités d’innovation institutionnelle, et de sa volonté d’inscrire la mobilité dans une logique de solidarité régionale et de durabilité. Sa concrétisation à l’horizon 2027–2029, bien que soumise à incertitudes, demeure plausible et hautement souhaitable pour l’avenir de l’agglomération franco-valdo-genevoise.

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Nouveau Tramlink des TPG
Quartier des Cherpines avec le prolongement du tramway 15
Réseau de tramways à l'horizon 2050
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